Les Etats de Vaud
Une institution a permis aux sujets directs des Savoie de jouer un rôle politique non négligeable. Attribués faussement à Pierre de Savoie, les Etats de Vaud ne sont attestés dans les sources que dès le milieu du XIV e siècle. Le comte, puis duc de Savoie ( Amédée VIII reçoit ce titre en 1416), convoque les représentants des ecclésiastiques, des nobles et des bourgeois des villes, c’est-à-dire les « Trois Etats », comme cela se faisait en Savoie, au Piémont, ou dans certaines provinces françaises, pour obtenir leur aide ou avis.
Mais, et c’est un privilège remarquable, les Etats de Vaud peuvent prendre l’initiative de se réunir pour discuter les affaires du pays. Les ecclésiastiques – les abbés et prieurs – n’y participent que peu. Les nobles convoqués sont les vassaux directs du comte de Savoie, par exemple le comte de Gruyère, les sires de Blonay, de La Sarraz. Ces assemblées, fréquentes, ne réunissaient le plus souvent que les députés des villes dépendant directement de la Maison de Savoie, entre autres les « Bonnes Villes » de Moudon, Nyon, Yverdon et Morges. Les rencontres avaient lieu en général à Moudon.
Grâce aux Etats de Vaud, ces villes purent défendre leurs privilèges : le duc ne pouvait exiger un service militaire (la chevauchée) plus long que celui prévu par les chartes, faire comparaître les bourgeois devant une cour de justice qui n’était pas la leur, lever des contributions sans leur accord. Elles y veillèrent avec un soin jaloux. La faiblesse du gouvernement savoyard dès le XV e siècle conduira les Etats de Vaud à assumer eux-mêmes les destinées du Pays de Vaud, notamment depuis les guerres de Bourgogne (1474-1476).
La peste
La peste, arrivée en Europe en 1347, marqua pour l’Europe et pour le canton de Vaud le début d’une longue crise. Il semble qu’elle ait peu frappé
le Pays de Vaud lors de la première épidémie des années 1348-1350. Mais elle fera des ravages au siècle suivant.
Lors de la visite d’églises de 1453, de nombreuses paroisses comptaient moins d’habitants qu’elles n’en avaient lors de la visite de 1416. Les serfs affranchis à cette époque ne reçurent pas toujours le droit de quitter la seigneurie ; dans des campagnes déjà touchées par la peste, des départs en masse vers les villes auraient privé le seigneur de ses revenus.
Guerres et crises politiques
Les comtes puis ducs de Savoie guerroyaient beaucoup et les finances de l’Etat s’en ressentirent. Parfois guerres d’expansion, mais aussi nécessité de défendre le pays menacé par les bandes de soldats pillards lors de la Guerre de Cent Ans : lors des trêves, les troupes sans emploi vivaient de brigandage. « Routiers » au XIV e siècle, « écorcheurs » au milieu du XV e siècle, inquiétèrent les Etats de Vaud.
Après le long règne d’ Amédée VIII (1383-1451), plusieurs ducs moururent prématurément, laissant le pouvoir à un enfant mineur, d’où les difficultés qu’amène toujours une période de régence. Par ailleurs, quelques ducs n’eurent pas les qualités d’un bon souverain. Enfin, la distribution d’apanages aux cadets entraîna la fin de l’unité de l’Etat. Jacques de Savoie reçut le Pays de Vaud en apanage en 1460 et devint comte de Romont. En conflit avec sa belle-soeur, la duchesse régente, il s’empara de plusieurs châtellenies restées sous la domination du duc, qu’un arbitrage bernois et fribourgeois l’autorisa à garder en 1471.
En effet, autrefois protégée des comtes, la ville de Berne avait réussi à affermir sa position et à constituer un territoire important. Victorieuse à Laupen en 1339 contre une coalition de voisins inquiets de voir monter cette nouvelle puissance, Berne était entrée en 1353 dans la Confédération helvétique. De protégée, elle devint l’alliée des Savoie, avant d’être leur rivale. Elle avait su aussi se réconcilier avec Fribourg, son ennemie tant que celle-ci avait été sous la domination des Habsbourg.
Les ducs de Bourgogne
Au-delà du Jura, une autre puissance s’était levée. Les ducs de Bourgogne, Philippe le Bon, puis Charles le Téméraire avaient reconstitué un Etat puissant de la Bourgogne à la Mer du Nord et Charles avait l’ambition de recréer l’ancienne Lotharingie, des Flandres à l’Italie. La richesse de ses Etats faisait du Téméraire un rival dangereux pour le roi de France Louis XI.
Charles était aussi en conflit avec les Habsbourg en convoitant la couronne impériale. Pour les villes du Rhin et pour Berne enfin, qui barrait la route d’Italie au duc et qui cherchait à s’étendre en direction du Jura, le duc de Bourgogne était une menace.