Avant propos du catalogue de 1845

Depuis nombre d’années, des personnes qui dans cette ville, sentaient les avantages de l’instruction désiraient qu’un moyen d’en faire jouir le public lui fût offert; ce moyen , c’était l’établissement d’une bibliothèque.

La loi de 1834 et l’organisation d’écoles supérieures à Rolle vinrent féconder cette idée. Mais il fallait, pour la développer dans ses conséquences essentielles, de ressources pécuniaires que la commune était dans l’impossibilité de fournir.

Avec la foi qui inspire les entreprises utiles dont le succès n’est douteux qu’aux regards de ceux qui ne sont point habitués à faire entrer Dieu pour beaucoup dans les choses de ce monde, quelques amis des lumières se ré unirent, jetèrent les bases de l’établissement, nommèrent un comité, qui fit un appel à la générosité publique, et à cet appel il fut répondu par des dons en livres, en argent , et la bibliothèque fut fondée. Des circonstances favorables accrurent rapidement ses richesses scientifiques et littéraires. Mais, pour les mettre à la portée de toutes les intelligences et de leurs besoins journaliers, il fallait un catalogue, qui est comme la clef de ce dépôt des connaissances humaines; avec son aide, l’ordre est établi et les recherches rendues faciles: c’est l’âme, en quelque sorte d’un établissement de ce genre, on le consulte, on l’interroge, et toujours il répond en guide éclairé, complaisant et fidèle.

En voyant ce catalogue de la bibliothèque qui possède aujourd’hui environ 12,000 volumes, il semble que sa composition n’a coûté que peu de frais de temps et d’intelligence, cependant aucun travail n’en exige davantage; c’est une science spéciale qu’il faut acquérir avant de se mettre à l’oeuvre. Le comité s’assura qu’en confiant ce travail à une personne qualifiée pour le faire, il devait se résoudre à un sacrifice considérable que ses principes d’économie et l’état de ses finances ne lui permettaient pas. En présence de ces difficultés, il entreprit lui-même la tâche avec dévouement, sans se dissimuler qu’elle était peut-être au-dessus de ses forces, et aujourd’hui il est heureux de pouvoir offrir au public le fruit de ses labeurs.

Les hommes spéciaux dans cette matière trouveront, sans doute, des défauts à ce genre de travail. Le comité ne prétend pas échapper à leurs justes critiques; il se recommande seulement à leur indulgence, à laquelle les circonstances difficiles de sa position semblent lui donner quelques droits. Il n’ignore pas que d’autres pouvaient mieux faire, mais il a la conscience d’avoir fait tout ce qu’il a pu.

Quoique le catalogue soit l’oeuvre du comité, il est vrai de dire, cependant, que plusieurs de ses membres pourraient, en quelque sorte, le revendiquer comme étant le fruit de leurs méditations, de leurs études, de leurs veilles et du sacrifice de jours nombreux. Celte observation est surtout applicable à M. Aug. Ernst, bibliothécaire desservant, dont le dévouement ne peut être assez apprécié.

Avant de terminer cet exposé, le comité éprouve le besoin de remercier les fondateurs et les bienfaiteurs de cet établissement dont la reconnaissance à inscrit les noms dans la liste qui suit ces pages. Ils trouveront aussi la copie de l’acte authentique passé entre le comité et la commune de Rolle, par lequel ils verront que la jouissance perpétuelle de cette bibliothèque est acquise au public. Il est bon de leur faire savoir que l’autorité municipale l’a assurée contre les éventualités d’incendie.

Maintenant, que la génération actuelle et celles qui lui succèderont soient désireuses de puiser journellement à cette source de lumières et de connaissances propres à développer les facultés de l’esprit et du coeur; que ces connaissances et ces lumières contribuent au bonheur de la famille, au respect de la religion et des moeurs, à la prospérité et à la paix publiques!
C’est le voeu le plus cher du comité.

Rolle, 8 Septembre 1845.
Le président du comité:
Ch. JUILLERAT.